Lorsqu’un contribuable choisit d’exploiter son entreprise par l’intermédiaire d’une société, certains éléments de son revenu présentent des incidences fiscales particulières.
Rémunération
Chaque année, l’actionnaire dirigeant doit s’interroger sur la combinaison optimale de salaire/dividende en regard de sa situation personnelle.
L’encaissement d’un salaire de 180 500 $ en 2024 permettra à l’actionnaire dirigeant de faire la cotisation maximale au REER en 2025, soit 32 490 $. Un salaire permet aussi à l’actionnaire de cotiser au RRQ et au RPC ou de participer éventuellement à un RRI (voir le Module VIII).
Avant de prendre une décision définitive, divers autres éléments doivent être considérés, notamment :
- le maintien du statut de société exploitant une petite entreprise;
- les avances non remboursées;
- la disponibilité d’un remboursement au titre de dividendes pour la société;
- les revenus d’autres sources de l’actionnaire, incluant l’impact sur le calcul des pertes nettes cumulatives sur placement et sur celui de l’IMR (voir le Module VII);
- la possibilité de déduire les frais de garde (voir le Module II);
- la possibilité de verser un dividende non imposable (dividende en capital);
- les retenues à la source;
- l’effet sur les versements d’acomptes provisionnels et la contribution au FSS;
- l’impact sur la cotisation requise en vertu de la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d’œuvre.
Le versement d’un salaire à votre conjoint et à vos enfants peut constituer une façon de fractionner le revenu, dans la mesure où ils participent à l’entreprise et où les montants versés demeurent raisonnables par rapport au travail accompli.
Boni de fin d’année
Afin d’optimiser la rémunération de l’actionnaire dirigeant, il est possible de lui verser un boni. Lorsque celui-ci est déclaré avant la fin de l’année d’imposition de la société, cette dernière peut le déduire immédiatement s’il est payé au plus tard le 180e jour après la fin d’année. Le paiement d’un boni est sujet aux retenues à la source au même titre que le salaire et permet également de différer ce revenu (voir le Module V).
Si une société déclare un boni au plus tard le 31 décembre, l’imposition en sera différée si vous ne le recevez qu’au début de l’année suivante.
Selon l’ARC, un boni versé à l’actionnaire dirigeant d’une société sera raisonnable, et donc déductible, si c’est la pratique habituelle de la société de distribuer ses bénéfices sous cette forme ou si la société adopte une politique de déclaration de bonis visant à récompenser les actionnaires pour les bénéfices réalisés qui sont attribuables à leurs aptitudes, à leur savoir-faire ou à leur entregent.
Prêts et avances
Les prêts et avances consentis par une société à un actionnaire sont imposables dans l’année civile au cours de laquelle il a reçu le prêt, sans qu’un crédit pour dividende lui soit accordé et sans qu’une déduction soit allouée à la société. L’actionnaire aura par ailleurs droit à une déduction dans l’année où le prêt sera remboursé.
Il existe deux types d’exceptions qui font en sorte que l’avance ou le prêt n’est pas inclus dans le calcul du revenu de l’actionnaire.
Exceptions générales
Un prêt n’est pas inclus dans le revenu de l’actionnaire :
- s’il intervient entre personnes non résidentes;
- s’il est obtenu d’une société dont le prêt constitue une activité habituelle de son entreprise et si des arrangements sont conclus de bonne foi pour son remboursement dans un délai raisonnable;
- s’il est remboursé dans un délai d’un an suivant la fin de l’année d’imposition de la société au cours de laquelle le prêt a été consenti et si ce remboursement ne fait pas partie d’une série de prêts et de remboursements.
Exemple : Si la fin de l’exercice financier de la société prêteuse est le 31 juillet, une avance consentie le 3 août 2022 et non remboursée au 31 juillet 2024 fera partie du revenu du particulier pour l’année d’imposition 2022, soit l’année civile au cours de laquelle le prêt non remboursé a été consenti. Cependant, si l’actionnaire rembourse le prêt en 2025, il aura droit à une déduction égale au montant du remboursement dans sa déclaration de revenus de 2025.
Pour reconnaître que des arrangements relatifs au remboursement sont conclus de bonne foi, il importe qu’ils soient conclus à la date où le prêt est contracté. Il est également recommandé de s’assurer que les modalités de remboursement prévues sont effectivement respectées par l’actionnaire.
Exceptions spécifiques
Aucun montant n’est inclus dans le revenu de l’actionnaire dans les situations suivantes16 :
- Il détient moins de 10 % des actions émises d’une catégorie du capital-actions de la société prêteuse et il a obtenu le prêt en raison de son emploi;
- Il détient 10 % et plus des actions émises d’une catégorie du capital-actions de la société prêteuse, il a obtenu le prêt en raison de son emploi et le prêt a pour objet de lui permettre d’acquérir :
- une habitation destinée à son propre usage;
- des actions du trésor de la société ou d’une société liée;
- une automobile pour son usage dans l’exercice de son emploi.
Ces exceptions s’appliquent si des arrangements ont été conclus pour que le prêt soit remboursé dans un délai raisonnable. Les critères suivants peuvent être utilisés pour déterminer si une dette particulière a été contractée en raison de l’emploi d’un actionnaire17 :
- L’octroi d’avantages similaires à tous les autres employés non actionnaires et à ceux occupant des fonctions semblables;
- Le degré de contrôle ou l’absence de contrôle sur la société par l’actionnaire qui a reçu le prêt;
- Le rapport entre l’avantage et les services fournis à la société et le salaire gagné.
Prêt à bas taux d’intérêt
Un prêt consenti à un actionnaire ou à une personne ayant un lien de dépendance avec ce dernier peut donner lieu à un avantage imposable lorsque le taux d’intérêt applicable au prêt est inférieur au taux prescrit trimestriellement par les administrations fiscales (5 % pour le quatrième trimestre de 2024). Le montant de l’avantage est égal au montant des intérêts réputés calculés au taux prescrit, moins tout montant remboursé par le débiteur à la société au plus tard le 30 janvier de l’année suivante. Aucun avantage ne doit cependant être inclus au titre des intérêts à l’égard d’un prêt dont le montant est inclus dans le revenu de l’actionnaire.
Exemple : Le 2 janvier, la société dont Francis est actionnaire et employé lui a consenti un prêt de 200 000 $ sans intérêt pour faire l’achat d’une maison. Si le taux d’intérêt prescrit a été de 5 % pendant toute l’année et que Francis n’a effectué aucun remboursement de capital avant la fin de l’année, il doit inclure dans ses revenus de l’année un revenu d’intérêt présumé de 10 000 $.
Vous avez avantage à ce qu’un dividende vous soit déclaré en début d’année pour annuler les avances de fonds qui vous ont été consenties par votre société.
Si le prêt est utilisé pour gagner un revenu d’entreprise ou de bien, l’avantage à l’égard de l’intérêt est déductible du revenu si toutes les conditions relatives à la déductibilité des intérêts sont satisfaites (voir le Module VII).
Il est parfois plus avantageux de payer les impôts sur l’avantage présumé que de payer des intérêts non déductibles, par exemple pour acquérir une résidence. Dans ces circonstances, envisagez la possibilité d’obtenir un prêt sans intérêt de votre société.
Dividende en capital
Une société privée possède un compte lui permettant de distribuer sous forme de dividende en capital (libre d’impôt) certains gains qui n’auraient pas été imposables s’ils avaient été reçus directement par le particulier. Ce compte comprend principalement la fraction non imposable des gains nets en capital, les dividendes en capital reçus d’une autre société et le produit net d’une police d’assurance vie reçu au décès d’une personne. Des documents prescrits doivent préalablement être transmis aux administrations fiscales afin qu’un dividende en capital se qualifie à ce titre.
Avantage imposable relatif à l’utilisation d’une automobile
Lorsqu’un particulier reçoit un avantage relatif à l’utilisation d’une automobile en sa qualité d’actionnaire, la valeur de l’avantage à inclure dans le calcul de son revenu est déterminée selon les mêmes calculs que ceux applicables à un employé (voir le Module V)18. Toutefois, si les activités de l’actionnaire sont principalement liées à la vente ou à la location d’automobiles (soit essentiellement les actionnaires au sein d’un concessionnaire automobile) l’avantage ne peut pas être calculé en utilisant le taux réduit de 1,5 % du coût moyen de la flotte automobile, applicable aux employés à moins qu’il ne soit raisonnable de considérer que l’avantage est reçu en sa qualité d’employé.
Responsabilité des administrateurs
L’administrateur d’une société peut être tenu responsable des impôts sur le revenu de la société, des retenues d’impôt des salariés, des cotisations au RPC, au RRQ, à l’AE, au RQAP et au FSS, de même que des montants de taxes non versés ou des remboursements reçus en trop.
En règle générale, un administrateur ne sera pas tenu responsable s’il a fait preuve de compétence et de diligence pour s’assurer qu’un système approprié de retenue et de remise des sommes prélevées à la source est en place et qu’il fonctionne adéquatement.
De plus, aucune action ne peut être intentée contre un ancien administrateur plus de deux ans après qu’il a cessé d’exercer ses fonctions. Le mandat d’un administrateur prend fin par sa démission, sa révocation ou sa destitution, son décès ou son inhabileté à exercer sa fonction.
Envisagez de démissionner si la société dont vous êtes administrateur connaît de sérieuses difficultés. Assurez-vous que votre démission est officiellement inscrite dans les livres de la société.
16 A cette fin, le pourcentage d’actions détenues par l’actionnaire est déterminé en incluant les actions détenues par des personnes avec qui il a un lien de dépendance.
17 Pour les règles concernant les prêts aux employés, voir le Module V.
18 Au Québec, au même titre qu’un employé, l’actionnaire doit tenir un registre de ses déplacements permettant de calculer l’avantage imposable. Ce registre doit être remis à la société au plus tard le 10 janvier suivant l’année d’imposition visée, à défaut de quoi l’actionnaire s’expose à une pénalité de 200 $ (voir le Module V).
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1 - Exploiter une entreprise
Voir 1 - Exploiter une entreprise -
2 - Fin d'exercice financier
Voir 2 - Fin d'exercice financier -
3 - Revenus
Voir 3 - Revenus -
4 - Pertes d'entreprise
Voir 4 - Pertes d'entreprise -
5 - Mesures incitatives pour les travailleurs
Voir 5 - Mesures incitatives pour les travailleurs -
6 - Dépenses générales d'entreprise
Voir 6 - Dépenses générales d'entreprise -
7 - Cotisations patronales
Voir 7 - Cotisations patronales -
8 - TPS/TVH et TVQ
Voir 8 - TPS/TVH et TVQ -
9 - Crédits d'impôts
Voir 9 - Crédits d'impôts -
10 - Agriculture
Voir 10 - Agriculture -
11 - Actionnaire dirigeant
Voir 11 - Actionnaire dirigeant -
12 - Incorporation des professionnels
Voir 12 - Incorporation des professionnels