Comment les employeurs doivent-ils tenir compte de la Subvention salariale d’urgence du Canada dans l’établissement de leurs prix de transfert?
Selon des chiffres publiés le 13 septembre 2020, plus de 1,1M d’employeurs canadiens ont demandé la Subvention salariale d’urgence du Canada (« SSUC ») pour faire face aux effets négatifs de la pandémie de COVID-19. Cette subvention salariale est disponible pour les entreprises canadiennes ayant connu une baisse significative de leurs revenus depuis mars 2020.
Selon la version la plus récente de la SSUC, un employeur canadien peut être admissible à la subvention salariale si la diminution de son revenu admissible atteint le seuil requis pour la période, même si la totalité ou la quasi-totalité de ses revenus proviennent de ventes à une société non-résidente, qui, elle, vend par la suite à des clients sans lien de dépendance.
Par conséquent, il est important que les employeurs canadiens admissibles comprennent comment traiter la subvention salariale à des fins de prix de transfert.
PTM-17 : position de l’Agence du revenu du Canada (ARC) sur le traitement de l’aide gouvernementale sur les prix de transfert
La position de l’ARC sur le traitement de l’aide gouvernementale dans le contexte d’une analyse des prix de transfert est décrite dans un mémorandum sur les prix de transfert (PTM-17) qui a été publié en mars 2016.
Selon le PTM-17, lorsqu’un contribuable recevant une aide gouvernementale utilise une méthode de prix de transfert basée sur les coûts pour déterminer le prix de transfert de produits, de services ou de biens incorporels vendus à une personne non résidente avec laquelle il a un lien de dépendance, les coûts ne devraient pas être réduits du montant reçu sous forme d’aide gouvernementale, à moins qu’il n’existe une preuve fiable que des parties sans lien de dépendance auraient réduit leurs prix dans les mêmes circonstances.
Dans le cadre d’une table ronde organisée le 15 septembre par la branche canadienne de l’Association fiscale internationale, l’ARC a confirmé que sa position sur le traitement de l’aide gouvernementale n’avait pas changé pour les programmes offerts en lien avec la pandémie de COVID-19.
Un représentant des Services de l’autorité compétente a en effet mentionné que l’ARC s’attendait à ce que les mesures d’aide temporaires octroyées aux contribuables canadiens demeurent au Canada, et que les montants reçus ne soient pas utilisés afin de réduire les prix de transfert chargés à des sociétés non résidentes. Il n’a pas fourni d’exemple des preuves que l’ARC attendait d’un contribuable qui décide de réduire ses coûts de montant équivalent à l’aide reçue pour déterminer ses prix de transfert.
Tout porte donc à croire qu’il sera très difficile pour un employeur canadien recevant la SSUC ou une autre forme d’aide gouvernementale de justifier une diminution des prix de transfert facturés à des non-résidents.
Des preuves fiables?
Depuis sa parution, l’un des plus grands reproches faits au PTM-17 est que le terme « preuve fiable » n’est pas défini dans le document, et qu’il n’y a aucune indication claire sur la manière de démontrer que les coûts utilisés dans le calcul des prix de transfert peuvent être réduits par le montant de l’aide gouvernementale reçue parce que des parties sans lien de dépendance l’auraient fait.
Cette critique est souvent entendue de groupes multinationaux qui ont investi dans des centres d’expertise en recherche et développement au Canada afin de bénéficier des incitatifs fiscaux offerts par les différents paliers de gouvernement.
Bien que cela ne soit pas spécifiquement mentionné dans le PTM-17, il est raisonnable de penser qu’une preuve fiable serait une situation où un contribuable canadien rend des services à la fois à des parties liées et à des parties sans lien de dépendance, et qu’il soit en mesure de démontrer que sa rentabilité sur les services rendus à des parties liées est similaire à sa rentabilité lorsqu’il rend ces mêmes services à des parties sans lien de dépendance.
Lorsqu’un contribuable canadien agit à titre de fournisseur de services exclusivement au profit de sociétés liées, une façon de démontrer que le profit réalisé par le fournisseur de services est de pleine concurrence pourrait être de calculer la majoration sur ses coûts totaux (non réduits du montant de l’aide gouvernementale reçue) et de déterminer si cette majoration sur les coûts se retrouve dans l’intervalle de pleine concurrence de majoration sur les coûts réalisée par des fournisseurs de services identifiés comme comparables.