L’innovation technologique est au cœur de la stratégie de développement des entreprises modernes. Comment Savoura en a-t-elle fait une priorité?
Savoura a fait de l’innovation le moteur de son activité de production en serre. Elle vient d’investir 55 M$ dans son plus grand projet à Sainte-Sophie, là où tout a commencé en 1995.
Ce complexe de serres de neuf hectares, le plus important jamais entrepris par le groupe, abrite la production de tomates dans des installations à la pointe de la technologie conçues pour répondre aux normes environnementales les plus élevées. Ce n’est qu’un début, puisque l’entreprise poursuit ses démarches d’optimisation.
Nous avons souhaité discuter de leur approche en innovation avec la présidente et cheffe de la direction des affaires, Peggie Clermont.
Demeurer compétitive et rentable
Pour demeurer rentable et s’adapter aux conditions du marché, l’entreprise a dû se questionner afin d’optimiser ses façons de faire en impliquant toutes les parties pour préparer et mettre en œuvre un plan d’action par étapes.
Peggie Clermont souligne l’importance de maintenir un équilibre entre la compétitivité de l’entreprise et le maintien de standards de qualité élevés. Selon elle, « il est crucial de rester compétitif dans notre secteur, mais pas au détriment de la qualité de nos produits. »
Ces mots reflètent son engagement à utiliser l’innovation pour améliorer les processus de production, réduire les coûts et augmenter l’efficacité sans compromettre la qualité des produits de Savoura.
Déterminer les besoins prioritaires
L’innovation, ce n’est pas seulement de la technologie; c’est un état d’esprit, une façon d’aborder les choses. Peggie Clermont voit l’innovation comme une démarche en continu, une manière de « faire autrement », et ce, dans toutes les sphères d’une entreprise, tant en recherche et développement qu’en vente et en production. Ce n’est pas statique, mais en perpétuel mouvement.
L’organisation, comme tout le secteur, fait face à de nombreux défis et doit déterminer quelles sont les priorités et les solutions les plus viables pour elle à court, à moyen et à long terme.
Pénurie de main-d’œuvre
Comme dans tous les marchés, l’un des plus gros défis du secteur agroalimentaire est le manque de main-d’œuvre. Si l’une des solutions est de se tourner vers des travailleurs étrangers, ça ne peut pas être la seule.
L’automatisation robotisée des processus est une voie à développer. Savoura avait beaucoup de données manuelles et des systèmes qui ne se parlaient pas entre eux. Centraliser les informations et automatiser les processus administratifs permettra à l’entreprise de gagner en productivité.
De plus, certaines tâches peuvent être automatisées afin de libérer les employés qui seront affectés à des tâches à valeur ajoutée, là où leur expertise sera mise à profit.
Concurrence internationale
L’autonomie alimentaire a un coût. Savoura est confrontée à la concurrence d’endroits comme le Mexique, l’Ontario et la Californie.
« La concurrence, particulièrement celle du Mexique, ne répond pas aux mêmes règles et ne fait pas face aux mêmes enjeux que nous », précise Peggie Clermont. Les différences en termes de normes environnementales, de rémunération et de bien-être des employés entraînent des défis supplémentaires.
Cette constatation rappelle la nécessité d’optimiser la production pour réussir à faire plus et mieux avec moins d’effectifs et moins d’énergie, donc de gagner en efficience.
Contraintes énergétiques
Les coûts d’installation et d’entretien et les coûts énergétiques sont des facteurs importants à prendre en compte. Ça coûte beaucoup plus cher de construire une serre au Québec qu’au Mexique, par exemple, à cause du climat moins favorable ici.
Des tarifs préférentiels, des subventions et d’autres programmes d’aide gouvernementale peuvent contribuer à rendre nos entreprises plus compétitives et à assurer la vitalité de ce secteur d’activité.
Changements climatiques
Face aux changements climatiques, l’entreprise doit s’adapter constamment à des conditions météorologiques fluctuantes : tempêtes de neige violentes qui peuvent abîmer les serres, hivers peu lumineux, gel au printemps, canicules en été, etc.
L’intelligence artificielle peut venir à la rescousse, par exemple, pour prédire avec plus de précision quand la tomate doit être récoltée.
Réticence aux changements
Comme dans tous les secteurs, les entreprises de l’agroalimentaire sont confrontées à la peur du changement.
« Comme dirigeant d’entreprise, on n’a pas toujours l’information complète sur l’innovation et la transformation numérique, sur la technologie nécessaire, ce qui est normal. Par le fait même, on peut se sentir déstabilisé et se demander si, avec l’arrivée de ces changements, on aura encore la même capacité à diriger et à manœuvrer son entreprise. »
On peut aussi se heurter à des employés plus réfractaires, à qui le changement fait peur. Pour toutes ces raisons, il faut prendre le temps de bien comprendre les changements à venir et savoir s’entourer. Il faut également former adéquatement les employés et ne pas oublier de les impliquer dans toutes les étapes.
Mettre en place des solutions pour favoriser le succès en innovation
« L’innovation, c’est partir d’une idée, en faire l’analyse, regarder sa faisabilité, mettre en œuvre un projet, mesurer les résultats puis veiller à l’amélioration continue de ce qu’on vient d’implanter », mentionne Peggie Clermont.
Certains éléments vont aider à s’ouvrir aux nouvelles idées et à les mettre en place avec succès.
L’engagement de la direction
Peggie Clermont souligne l’importance de l’engagement de la direction dans le processus d’innovation. Pour elle, il est crucial de définir un plan d’action et de consacrer des ressources financières à l’innovation malgré les coûts, car le statu quo a aussi un coût.
L’implication des employés
L’entreprise peut également encourager l’innovation en sollicitant la créativité de ses employés. Savoura a créé un comité d’innovation incluant des employés de tous âges et de tous les départements. Ils ont également nommé un directeur des projets spéciaux qui a l’unique responsabilité de favoriser le changement pour chaque projet mis en place (en coordonnant, documentant, formant).
La collaboration et le partenariat
Peggie Clermont suggère que l’entreprise puisse se tourner vers l’extérieur pour favoriser l’innovation. Il s’agit de collaborer avec d’autres entreprises ou des universités.
Le soutien de la collectivité
Les différents paliers de gouvernement peuvent également jouer un rôle majeur pour encourager l’innovation. « Au niveau collectif, ça prend des programmes d’aide qui sont ciblés pour soutenir les entreprises innovantes par de l’aide financière, des mesures fiscales favorables ou, encore, en encourageant la formation dans les domaines liés à l’innovation et à la technologie », conclut-elle.