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Avis d'experts

Faire preuve d’agilité: une réalité aussi pour le secteur financier

Pour soutenir les entreprises dans cette nouvelle normalité, le secteur financier a dû modifier ses façons de faire. Entretien avec Nadine Renaud-Tinker.

Parmi les industries qui ont fait preuve d’agilité dès le début de la pandémie, il y a celle des secteurs financiers, dont l’institution RBC Banque Royale Québec qui a placé rapidement toute son équipe en mode solutions pour appuyer les entreprises et les particuliers.

Nadine Renaud-Tinker, présidente Québec de la première banque en importance au Canada, a partagé ses observations et des conseils avec le président de Raymond Chabot Grant Thornton, Emilio B. Imbriglio,  lors d’une rencontre tenue le 3 septembre 2020 dans le cadre de la série des Rendez-vous Tête-à-tête.

D’un mode urgence à une approche sur mesure

« Ce n’est pas une année facile pour nos entrepreneurs ni pour aucune organisation », lance Mme Renaud-Tinker en début d’entretien. « Une crise de santé, qui crée une crise de santé économique et financière […]. En 150 ans à la RBC, on n’a jamais vu ça. Le défi est d’amorcer la phase 2, soit celle de la relance, et de préparer l’avenir, même si l’incertitude est toujours là. »

La transparence, la communication et l’empathie font partie intégrante de la relation client de l’équipe de Mme Renaud-Tinker.

« Je travaille beaucoup avec nos leaders et nos équipes pour continuer les conversations avec nos clients. Les premiers mois, on était en mode urgence et en mode solutions d’affaires […] On a mis en place les mesures gouvernementales et les moratoires très rapidement. On a agi vite pour nos clients et nos employés, sans vraiment poser de questions », affirme-t-elle.

Mme Renaud-Tinker précise qu’on a généré de la liquidité pour soutenir les clients, les entrepreneurs et les particuliers dans la première phase et que la RBC le fait d’une autre façon dans la deuxième phase.

« C’est un délicat équilibre tant pour les entreprises que pour les particuliers. Au lieu de continuer automatiquement les moratoires, c’est plutôt du cas par cas. » Pour elle, les moratoires ne sont pas toujours la solution, car ils mènent à l’endettement des clients. « On a fait plus de 27 M$ de reports de paiement dans les derniers mois. C’est énorme et on n’a jamais fait ça avant », précise-t-elle.

Elle soutient aussi que leurs équipes « doivent maintenant se concentrer davantage sur la réalité de chaque client pour pouvoir créer les structures nécessaires. La banque travaille donc des solutions one-on-one. […] Personne ne veut perdre d’entreprises. On veut trouver des solutions avec nos clients ». La patience, l’empathie et la proactivité sont des tendances qui vont perdurer.

Une lente reprise économique

Mme Renaud-Tinker indique que, selon ses économistes, la reprise économique peut prendre de deux à trois ans pour des secteurs comme l’hôtellerie, les voyages, la restauration, la culture, les arts et l’aviation, tout en soulevant la nécessité d’avoir plus de mesures ciblées pour ces industries. Le défi est de traverser les deux à trois prochaines années puis de survivre. Comme dans toutes les industries, « tout le monde doit se réinventer ».

Le rôle des institutions financières pourrait-il se redéfinir?

Abordant le rôle interventionniste de l’État qui ne disparaîtra pas dans un avenir proche, M. Imbriglio pose la question à savoir si celui des banques pourrait être appelé à évoluer, allant au-delà de celui de prêteur, pour celui de propriétaire, par exemple. Aux yeux de Mme Renaud-Tinker, ce changement n’est pas pour aujourd’hui, quoique le monde change rapidement.

« Nous sommes de grandes organisations avec nos marchés de capitaux, nos assurances, notre gestion de patrimoine […] Notre force vient du fait que nous avons une grande diversité de solutions et de conseils. La performance de la banque est exceptionnelle dans sa totalité. On investit déjà dans des entreprises québécoises et on va continuer de le faire. »

La RBC au Québec versus dans le reste du Canada

À propos des différences de la banque au Québec par rapport au reste du Canada, la dirigeante québécoise répond que la RBC, au Québec, a une occasion de continuer à grandir, en détenant le 3e rang des parts de marché et une force de 7 000 employés, alors que dans le reste du Canada, l’institution occupe de loin le 1er rang au chapitre des parts de marché.

« Une grande partie du siège social est demeurée au Québec. Que ce soit au niveau des opérations, des fonds mutuels, du risque, de la fraude, du centre visa, de notre centre d’appels à Montréal qui dessert tout le Canada… Nous avons un bureau national avec une bonne équipe. » Elle précise qu’ils sont ainsi beaucoup plus impliqués dans la prise de décisions locales.

La présidente a par ailleurs indiqué que toutes les succursales RBC sont actuellement ouvertes et, en moyenne, ce sont 50 % des effectifs qui travaillent au bureau, tandis que tous les autres employés sont en télétravail afin de bien respecter la distanciation.

Quelques conseils aux entrepreneurs

Le président a demandé à Mme Renaud-Tinker si elle avait des conseils à donner aux entrepreneurs. « De continuer à être créatif et résilient. Les entreprises d’ici ont tellement démontré de courage. On s’attendait à vraiment pire les six premiers mois et c’est grâce aux entrepreneurs québécois qui ont pris de bonnes décisions rapidement qu’on est là aujourd’hui. L’innovation, la nécessité de s’ajuster constamment et de continuer de rester proches de vos gens − car sans nos employés, on n’a pas de clients et on n’a pas de business. »

Quant à la relation des entrepreneurs avec leur banque, Mme Renaud-Tinker a conseillé « de ne pas oublier de demander de l’aide et de partager l’information […]. Soyez transparent. On est partenaire de nos clients. Plus on connaît votre réalité, plus on va être en mesure de bâtir une stratégie ou une structure qui va vous aider. »

Mme Renaud-Tinker insiste aussi sur l’importance de préparer des projections à partir de ce que les entrepreneurs savent (fournisseurs, contrats, etc.). « Sans projections ni plan adapté et ajusté au présent ou à l’avenir, c’est difficile pour nous de créer une structure qui va fonctionner pour le futur. »

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